La nouvelle voix du féminisme marocain
Hshouma, signifie « honte » en dialecte marocain. Plus précisément, ce mot désigne l’ensemble des sujets tabous que l’on ne doit pas aborder en société ou en famille.
Mi-projet artistique, mi-initiative éducative, cette bande dessinée se veut une tentatived’ébrécher les tabous liés au genre, à l’éducation sexuelle, aux violences faites aux femmes.
Les femmes dessinées par Zainab Fasiki peuvent sembler provocantes et fatales, parfois même sarcastiques. Nues, en lingerie ou portant le voile, en ville ou au hammam, elles se moquent d’un masculisme hypocrite et effrayé par les corps, faisant ainsi fi des canons de beauté imposés par les autres.
Ces dessins sont ainsi autant de manières de célébrer les corps et leur beauté, mettant à mal un des piliers sur lequel repose nos sociétés patriarcales, autant au Maroc qu’en Europe.
Outre la beauté du trait, Hshouma est un livre important, qui milite pour la libération de la femme dans le monde arabe.
Pourquoi Hshouma ?
le mot Hshouma signifie tabou en dialecte marocain, il est aussi utilisé pour dire : Tais-toi ! pour arrêter la conversation.
<< Au Maroc, La nudité dans l’art est encore Hshouma, tout comme de nombreuses libertés individuelles, et c’est pourquoi j’ai créé ce livre. Le livre Hshouma est un guide dessiné simple qui explique les identités de genre, les orientations sexuelles et les corps, qui sont des tabous au Maroc et nous ne pouvons les apprendre ni à l’école ni en famille. Ce livre explique également pourquoi ces 3 détails sont séparés et peuvent changer au cours de notre vie. Il est avant tout un guide laïque qui détaille le corps et la sexualité dans la culture marocaine avec une neutralité religieuse, ce qui est rare au Maroc. Il est un appel à la tolérance aux marocains pour mettre fin à l’extrémisme et à la violence basée sur les genres, les orientations et les croyances. Hshouma est le livre que j’avais besoin de lire quand j’avais 15 ans, si je l’avais, il ne me faudrait pas des années pour me comprendre dans une société qui pénalise de nombreux droits. Il n’est pas seulement pour les adolescents, mais pour tout le monde, car j’ai rencontré beaucoup de marocains qui ont 40 ans et ont encore besoin de comprendre les genres. La culture marocaine n’est pas encore habituée à une telle libération, elle doit donc être présentée de manière simple et c’est pour cela Hshouma est un livre basique. Donc si vous êtes déjà un marocain qui croit en ces libérations, partagez ce livre avec toutes les personnes que vous connaissez. Si vous voulez tout savoir sur votre corps et votre sexualité, il suffit de lire ce livre dans votre chambre, vous n’aurez pas à demander aux autres car c’est tellement Hshouma. Quand j’ai commencé ce livre, il était censé être en Darija marocain, mais après de nombreuses censures et un manque de mots techniques en Darija sur nos corps, j’ai dû choisir le français car c’est la langue que nous partageons tous au Maghreb et car plusieurs Maghrébins francophones vivent sur d’autres continents, et ils souffrent également de la culture Hshouma avec leurs familles, sachant qu’ils quittent le Maroc à cause de cette culture. Et c’est pourquoi j’invite les Marocains à travers ce livre à accepter la diversité, afin que nous puissions tous vivre en paix dans notre pays sans avoir à le quitter.
Les gens qui ont besoin de briser les tabous ne sont pas seulement les marocains qui ne savent ni lire ni écrire, j’ai découvert que cela n’est qu’un stéréotype qui a été créé dans la société marocaine moderne. Malheureusement, la plupart des Marocains qui savent lire et écrire, qui ont des emplois importants, qui parlent d’autres langues, et qui ont même étudié et vécu en dehors du Maroc, sont toujours violents envers les autres Marocains différents. Et ce livre est fait spécialement pour eux parce qu’ils sont l’avenir de notre pays. Chaque fois que je brise les tabous sexuels au maroc, beaucoup commenceront à insulter au lieu de débattre avec respect, et c’est pourquoi ce livre a parfois été attaqué. Ces attaques confirment l’extrémisme que nous avons encore dans notre société, et il faut l’arrêter. La libération sexuelle et corporelle n’a pas été inventée par d’autres pays, ce sont nos besoins naturels et nos droits, quelle que soit notre nationalité. Ces droits dans la région de Mena, sont encore considérés comme des péchés ou de la bourgeoisie. Mais la vérité est que ce sont les besoins des classes moyennes et pauvres, car ce sont eux qui ne peuvent pas vivre ces droits fondamentaux et ne peuvent pas acheter l’intimité. Ce livre est maintenant dans d’autres langues, et une fois que je trouverai un éditeur arabe qui acceptera de le publier, il sera en arabe plus tard. J’ai également réalisé ce livre pour encourager la nouvelle génération marocaine à lire des livres. Merci à tous ceux qui ont choisi de le lire, et grâce à eux, ce livre a été en rupture de stock plus de 4 fois par mois dans le monde depuis sa publication le 12 septembre 2019. Le seul but de ce livre est de faire la paix avec notre corps et avec les autres. Parce que le Maroc est le pays de la paix et de l’amour. >>
Zainab Fasiki , l’auteure du guide dessiné :
Hshouma Corps et Sexualité au Maroc , Massot Editions .