Pour cette 26e édition du Festival international du film d’histoire de Pessac, son co-créateur Jean Lacouture n’est plus parmi nous. Je tiens à saluer la mémoire de ce grand journaliste, historien et biographe, à ce témoin du 20e siècle qu’il a décrit avec un talent remarquable au fil de plus de soixante-dix ouvrages. La création du Festival international du film d’histoire en 1990 est pour moi un souvenir merveilleux. Nous avions conçu ce festival avec Jean Lacouture et Jean-Noël Jeanneney sur la base d’un mariage entre l’histoire, une passion commune, et l’image. Nous avions l’intuition qu’un large public pouvait trouver un intérêt à participer à des débats, avec des écrivains, gens de cinéma, journalistes et universitaires, autour d’une sélection de films d’histoire. Le succès ne s’est jamais démenti depuis la première édition. Merci à vous tous d’être chaque année plus nombreux.
Le thème du Festival international du film d’histoire 2015, « Un si Proche-Orient », n’aurait pas déplu à son cofondateur qui débuta sa carrière de reporter au Caire. Je me félicite cette année encore de la qualité et de la richesse du festival qui, à travers 98 longs-métrages, va vous offrir une semaine de débats passionnants autour d’une trentaine de spécialistes du Proche et Moyen-Orient.
Le pétrole a-t-il fait le malheur du Proche-Orient ? Pourquoi le Proche-Orient est-il devenu la poudrière du monde ? La démocratie se décrète-t-elle ? Autant de questions, complexes, passionnantes, qui seront abordées tout au long du festival pour mieux comprendre ce Proche-Orient si beau, mystérieux et imprévisible.
Bon festival à toutes et à tous !
L’éditorial d’Alain Rousset, président du Festival
Une réalité plus forte que l’imagination
Autant l’Égypte ancienne, l’Iran des mille et une nuits et tout le Moyen-Orient en général ont largement alimenté l’Imaginaire du cinéma occidental (« Cléopâtre », « Pharaon », « L’Égyptien », « Salomon et la Reine de Saba »), autant la réalité d’aujourd’hui a singulièrement réduit la vision qu’on peut en avoir. Régimes autoritaires, dictatures, coups d’états, intégrismes fanatiques, peuples sans état et sans frontières, guerres diverses, révolutions avortées ou réussies laissent en effet peu de place aux rêves et au plaisir. Plus de comédies ou de vaudevilles destinés à faire rire le public. Ce qu’on appelle le cinéma de divertissement n’est plus qu’un lointain souvenir. Désormais les films rendent compte de la réalité. Comment pourrait-il en être autrement ?
Comme un miroir posé le long de la route, le cinéma finit toujours par nous renvoyer les événements qui se déroulent devant lui. Témoins partisans ou se voulant objectifs, mais toujours passionnés, les cinéastes d’aujourd’hui nous dressent donc le tableau impitoyable d’un monde malade, qui n’aspire pourtant qu’à trouver la paix. Déchirés, révoltés, engagés mais impuissants, ils nous brossent ainsi le portrait sauvage et cruel de peuples en souffrance, qui sonne comme un terrible réquisitoire. Impossible de rester de marbre devant ces histoires effrayantes ou ces témoignages accablants. Le cinéma actuel du Proche-Orient n’est bien souvent qu’un long cri désespéré : son urgence fait sa noblesse. Faisant suite aux grands ainés du passé, Youssef Chahine ou Yilmaz Güney par exemple, les réalisateurs d’aujourd’hui sont devenus les peintres à charge de leur société.
Bahman Ghobadi (Irak), Nuri Bilge Ceylan (Turquie), Cherien Dabis (Jordanie), Ronit et Shlomi Elkabetz, Amos Gitaï, Igaal Nidam (Israël), Asghar Farhadi, Abbas Kiarostami, Dariush Mehrjui, Jafar Panahi (Iran), Nadine Labaki, Jocelyne Saab (Liban), Ossama Mohammed (Syrie), Haifaa al-Mansour (Arabie Saoudite), Mohamed Diab, Yousry Nasrallah (Égypte), Hiner Saleem (Kurdistan) Elia Suleiman (Palestine), tous, à leur manière, filment l’Histoire en marche et nous la donnent à comprendre. Rude leçon !
L’éditorial de Pierre-Henri Deleau, délégué général du Festival
En savoir plus sur le site du Festival international du film d’histoire de Pessac