Chaque lettre de l’alphabet arabe s’écrit à la fois détachée et attachée. Elle se trace aussi différemment selon qu’elle est placée au début, au milieu, à la fin d’un mot ou de façon isolée. Jusqu’à l’invention de l’informatique, ce fut donc un casse-tête technique de créer de nouvelles typographies arabes, mais les résistances ont aussi été culturelles. Aujourd’hui encore, les choses avancent très lentement.
Pendant longtemps l’Empire ottoman s’oppose au développement de l’imprimerie. L’écriture est associée à la calligraphie et à la spiritualité. Le Coran la lie au sacré. « Elle ne peut donc être mécanisée », explique l’historienne de l’art Perin Emel Yavuz. Les classes éduquées, qui produisent et vendent les livres manuscrits, font également front, « de peur de perdre leur autorité et leur source de revenus », précise Huda Abifarès, créatrice de la Fondation Khatt, un centre de recherche et une maison d’édition sur le design arabe et la typographie situé à Amsterdam.
Finalement, au XVIIIe siècle, l’Empire ottoman prend en compte la puissance de l’écriture pour renforcer son pouvoir et diffuser la connaissance. En 1727, le sultan Ahmet III promulgue un décret autorisant les impressions de textes en arabe. Les nouvelles polices tentent de reproduire le naskh, l’un des plus anciens styles de calligraphie. Facile à lire et à écrire, c’est celui qu’on utilise...