Instituts de recherches français à l’étranger (IFRE)

, par Mohammad Bakri

Déployé au fil des décennies, le réseau des Instituts de recherches français à l’étranger (IFRE) est constitué de 27 établissements à autonomie financière (EAF), implantés dans 37 villes à travers le monde si l’on prend en compte les antennes de certains d’entre eux.

Petite histoire d’une géographie

La géographie de ce réseau montre une forte présence en Méditerranée et au Proche et Moyen-Orient. En y incluant l’Asie mineure et centrale, dix pays comptent un IFRE ou l’une de ses implantations (Maroc, Tunisie, Égypte, Liban, Syrie, Jordanie, Turquie, Iran, Ouzbékistan, Yémen).

L’Afrique sub-sahélienne et orientale en abrite cinq (Soudan, Éthiopie, Nigeria, Kenya, République sud-africaine). L’Asie compte également cinq implantations (Chine, Japon, Thaïlande et deux instituts en Inde). L’Europe, de l’Atlantique à l’Oural, en accueille le même nombre (Grande-Bretagne, République tchèque, Russie et deux établissements en Allemagne). Enfin, l’Amérique est présente par deux sites (au Mexique et au Pérou) avec des antennes au Guatemala, en Bolivie, en Équateur et en Colombie.

Cette géographie illustre des évolutions des besoins de la recherche française à trois moments de la vie diplomatique française à laquelle ces établissements participent.

  • Le temps de l’archéologie orientale

On sait combien les puissances européennes dès la fin du XVIIIe siècle se sont passionné pour les temps reculés et les civilisations disparues de la Méditerranée et de l’Orient. Il fut un temps où les activités des diplomates comportaient celles de l’archéologie et des collections d’antiques, modestes ou monumentales, à titre privé ou à destination des musées de leur nation d’origine. Sous la IIIe République, les savoirs accompagnaient la politique des Outremers et le rang parmi les puissances occidentales impliquait la possession de connaissances sur les civilisations des autres continents.

La diplomatie d’influence intègre alors la création de grandes missions archéologiques et/ou culturelles particulièrement vers l’Orient qu’il fût proche, moyen ou extrême. Ce fut le temps de la création de la mission archéologique française en Iran (1890) lointaine ancêtre de l’Institut français en Iran (IFRI), de la Délégation archéologique française en Afghanistan (DAFA) créée en 1923 et de la Maison franco-japonaise voulue par l’ambassadeur Paul Claudel en 1922. À ce premier temps de Instituts français à l’étranger appartiennent aussi l’École française de droit du Caire (lointaine ancêtre de l’actuel CEDEJ), l’Institut français d’études arabes de Damas qui intègrera l’Institut français du Proche-Orient.

  • Le temps des Indépendances et du Tiers-Monde

Après la Seconde guerre mondiale, en hommage à l’allié britannique, se crée (1946) la Maison française d’Oxford (MFO), puis ce sont vers d’autres horizons que se porte le regard du ministère des Affaires étrangères et européennes, vers des pays d’un grand intérêt pour la recherche française en sciences humaines et sociales et ce, d’autant qu’ils s’inscrivent dans une nouvelle carte du monde : Institut français de Pondichéry (IFP, 1955), Mission archéologique française en Éthiopie (1955, devenant en 1991 la Maison française des études éthiopiennes puis en 1997, le Centre français des études éthiopiennes, CFEE), KhartoumSection française de la direction des antiquités du Soudan (SFDAS en 1969), Centre d’études africaines (à Nairobi en 1977, qui devient en 1992 l’Institut français de recherche en Afrique, IFRA), Centre français d’études yéménites (1982, devenant en 2001 le Centre français d’archéologie et de sciences sociales de Sanaa, CEFAS), Mission archéologique française en Inde (1983, devenant le Centre de sciences humaines de Delhi, CSH), antenne de sinologie à Hong Kong (1978) qui devient en 1991 le Centre d’études françaises sur la Chine contemporaine (CEFC). En 1974, le Centre de recherche français de Jérusalem (CRFJ) est fondé sur les soubassements de la Mission archéologique française en Israël créée en 1952.

L’Amérique latine est également représentée par la création d’un Institut français des études andines (IFEA) à Lima en 1948 avec, dans les années 1980, des antennes en Bolivie, Équateur et Colombie. Et en 1983, la Mission archéologique et ethnologique française au Mexique (1961) devient le Centre d’études mexicaines et centraméricaines (CEMCA) avec une antenne au Guatemala.

Par ailleurs, image du rapprochement franco-allemand des évolutions du paysage universitaire entre les deux pays, se met en place 1977 à Göttingen une mission historique française en Allemagne (MHFA), qui fusionne en 2009 avec l’Institut français de Francfort : le nouvel Institut français d’histoire en Allemagne s’installe sur le Main.

  • Une nouvelle carte du monde

La fin du XXe siècle voit se dessiner de nouvelles frontières à la suite de la dislocation de l’Union soviétique alors qu’émergent de nouvelles puissances économiques particulièrement en Asie et que l’Europe se construit et tisse de nouveaux liens avec le continent africain.

Il résulte de ce monde nouveau, en Asie, un Institut français d’études sur l’Asie centrale (IFEAC) créé en 1992 à Tachkent et un Institut de recherche sur l’Asie du sud-est contemporain (IRASEC) à Bangkok en 2001. En Afrique, l’IFRA s’implante à Ibadan au Nigeria en 1990, un Institut français d’Afrique du sud (IFAS) est créé à Johannesburg en 1995, un Institut de recherche sur le Maghreb contemporain (IRMC) est fondé à Tunis en 1992 et le Centre Jacques Berque voit le jour à Rabat en 1999.

Les implantations en Europe se complètent avec le Centre français de recherche en sciences sociales (CEFRES, 1991) à Prague, le Centre Marc Bloch à Berlin en 1992 et le Centre franco-russe en sciences humaines et sociales à Moscou en 2001.

Partager

Imprimer cette page (impression du contenu de la page)